« Eh, Jewel ! » m'appelait une voix familière. Je me retournais brusquement. Il faisait beau, nous étions en été et les vacances battaient leur plein. J'avais seize ans, toutes mes dents – ou presque – et j'étais vêtue de mes simples sous vêtements, je me préparais pour un tour en ville. Cela faisait bien longtemps que je ne demandais plus avant de me servir de la salle de bain de la maison de Sid. La porte s'ouvrit sur un Maxxie et un Sid encore plus rouges que d'habitude. « Eh ! Mais... » J'attrapais mes vêtements pour me cacher et leur claquait la porte au nez. J'entendis Jimmy rire au loin. Je m'habillais en vitesse pour sortir de leur salle de bain le plus rapidement possible. Les deux idiots n'avaient pas bougés de leur place, bouche bée. « Eurf... J'pense que je vais pas aller à la plage, au final. » dis-je, dans un grand moment de solitude. Maxxie passa une main dans ses cheveux, gêné. Sid, lui, regardait ailleurs. « On est vraiment désolés, Jew'... » A mon tour, je fixais mes pieds, mal à l'aise. « Euh... Oui... Vous avez pas fait exprès... C'est pas grave, je vous en veux pas... » Une lueur d'espoir traversa le regard Maxxie. « Alors, hum, tu viens avec nous, hein ? » Je le fixais. Ses yeux noisettes vinrent se poser sur ceux de Sid. Celui-ci manqua de s'étouffer de rire. Je ne compris pas ce qu'il se passait mais les garçons me cachaient quelque chose. Le beau brun mit un énorme coup à mon meilleur ami. Je m'empressais de lui répondre afin que l'affaire ne dégénère pas. « Je sais pas... J'ai des trucs à faire, en fait... J'ai complètement zappé. Salut ! » Je pris mon sac en toile et me dirigeais vers la porte d'entrée. J'eus à peine le temps d'entendre un sifflement de la part de Jimmy que la porte se refermait déjà derrière moi, émettant un bruit sourd donc elle n'avait pas l'habitude d'être l'auteure. J'étais furieuse et ils l'avaient bien devinés.

Un réveil sonna. Qui avait oublié de le débrancher alors que nous étions samedi ? Je jetais un coup d'oeil à mon portable. Trois appels en absence. Je me levais lentement pour constater que je n'étais pas chez moi. Pas en terrain inconnu, mais pas dans mon lit ni dans l'appartement que je partageais avec ma tante. Maxxie dormait encore, à mes côtés. Il était imperturbable et le son du réveil ne l'avait pas sorti de son sommeil. J'essayais de me souvenir ce que je faisais là, en soutien-gorge, dans son lit mais rien n'y fit. Ma mémoire ne voulait pas me passer le film de ce qu'il s'était passé cette nuit-ci. Je me souvins avoir débarqué chez lui, dans la soirée. Peut être étais-je trop fatiguée pour rentrer. En tout cas, je n'avais pas prévenu ma tante et celle ci s'était inquiétée, ce qui était la certaine raison des trois appels manqués. Je me connaissais, je n'avais surement pas dépasser la limite que je m'étais fixée avec Maxxie, hier soir. Cela faisait longtemps que je pensais à sauter le pas, après un an de relation, mais j'attendais encore une fois d'être prête. Est ce que c'était si grave que ça ? Une part de moi me disait que si j'attendais c'était parce que je ne voulais pas le faire avec lui. Mais j'aimais Maxxie et... Et quoi ? Il y a quelques temps, je me disais qu'il était le bon, que c'était lui l'unique. Mais aujourd'hui, j'avais peut être changé d'avis, je ne savais pas ce que je ressentais. Tout était flou, dans ma tête, en fait. La porte s'ouvrit, me sortant de mes rêveries. Je tirais la couette sur moi. « Euh... Toc toc toc ? » Olly passa sa tête dans la chambre de son frère. « Ah ! Euh... Désolé ! » fit-il. Je lui fis signe d'approcher. « Nan, t'inquiète. Il dort comme un rat mort, celui-là ! Il s'est passé quoi, hier ? » Il fut étonné que je lui pose cette question. Comme ci la réponse était évidente. « Ben rien, t'es venue à la maison et il était quatre heures du mat' quand tu t'es rendue compte que tu devais rentrer chez toi et comme notre chambre d'amis est en travaux... » Il éclata de rire, désignant la situation. « Eh ! Mais nan, te fais pas d'idées, il s'est rien passé, ok ? » Il hocha la tête, dubitatif, et repartit par où il était venu. Je m'habillais en quatrième vitesse, me rappelant la scène de la salle de bain, deux ans plus tôt, manquait d'éclater de rire. Dans la précipitation, j'appelais ma tante afin de la rassurer. Je laissais un mot à mon petit ami, ne voulant pas le réveiller et je m'éclipsais. J'arrivais dans mon appartement, vide. Mon téléphone sonna à la minute où j'entrais dans ma chambre. Je décrochais. « Allo ? » « Jew' ? C'est Dana ! » « Oh, Dana ! Salut ! Comment tu vas ? » Dana et moi nous nous connaissions depuis déjà un bout de temps. J'étais l'une des seules à être au courant pour sa musique et nous avions plusieurs points communs. Nous étions bonnes amies et nous essayions de nous voir le plus souvent possible. « Bien et toi ? » Elle ne me laissa pas le temps de répondre et enchaîna. « Tu vois, là, je suis partie faire les boutiques avec une amie ce matin. On va aller manger japonais, si ça t'intéresse tu peux nous rejoindre ! » « Ok ! J'arrive ! » Alors que je raccrochais, j'ouvrais déjà ma porte d'entrée, mes clés dans les mains. Je laissais tomber mon portable dans mon sac et claquais la porte d'un coup sec. Je pris la route du quartier jappe au nez. Arrivée devant un restaurant nommé « Les sous chie de Yao Ming », nom qui, au passage, ne donnait pas très envie d'y manger, j'attendais alors mon amie. Elle finit par pointer le bout de son nez, ses cheveux bruns dans le vent. Mais la belle brune n'était pas seule : Katalina, l'ex solitaire de Jerrytown, se baladaient à ses côtés. Celle ci avait l'air aussi informée que moi sur ce qui concernait les conviés à ce déjeuné. Elles arrivèrent près de moi et je poussais la porte du restaurant. Je claquais deux bises sur les joues de Dana, laissant Kat' de côté. « Hum... Tu m'avais pas dit pour... » Je désignais son amie du menton. Sortez les fusils, Jewel arrive !

« Kata, dépêche-toi ! » Alors que j’étais tranquillement devant mon armoire à me choisir une veste, Dana débarque dans ma chambre telle une furie échappée de l’asile. « Calm down querida, on est pressées ? » Oui bon, elle m’avait demandée d’être prête pour maximum dix heures, il est presque dix heures et demie et je ne suis pas prête du tout. « Baloo, si un jour t’es à l’heure, je te jure que je joue au loto, j’vais être hyper supra riche. » Je rigole légèrement attrape une veste rose fushia qui s’accorde très bien avec mon jean bleu foncé, mes petites ballerines noires et mon top bleu turquoise. Ouais, j’aime les couleurs flashy. Bref, j’attrape mon sac et je m’installe dans la voiture de Dana. Ouais, parce que moi, j’en ai pas, mon père a pas les moyens de m’en acheter une, c’est pas facile pour lui. Bref, on est dans sa voiture et elle met le son de la musique à fond et on chante comme deux grosses patates. Enfin, surtout moi, qu’on se le dise : je ne sais pas chanter.

Arrivées au centre commercial, on se dirige vers une première boutique. Je suis Dana partout en ne m’intéressant qu’aux articles en solde. Parce que bon, j’ai beau me faire passer pour une meuf hyper superficielle et tout, je n’ai pas les moyens de m’acheter des vêtements hors de prix, alors oui, je fais des folies mais que dans les soldes. Mais parfois, je m’amuse à prendre des articles chers, juste pour les essayer et rêver un peu. Je serais riche un jour, et je pourrais me payer ce genre de choses, mais pour l’instant on se calme. Dana et moi essayons une tonne de vêtements mais au final, je n’achète qu’une simple robe rouge/bordeaux. Nous faisons la même chose dans tous les autres magasins ensuite. Je ne sais même plus combien on en a fait, trois, quatre cinq, peut-être plus, peut-être moins, aucune idée, je n’ai pas fait attention.

Là, nous avons décidé d’aller dans un dernier magasin avant d’aller déjeuner dans un restaurant japonais. J’suis pas très fan de la nourriture japonaise, le poisson cru et tout ça mais j’ai eu de très bons échos de ce restaurant-là donc j’imagine que ça doit être très bon. « Baloo, ça te dérange si j’invite une amie à manger avec nous ? » que j’entends à travers les rideaux de la cabine d’essayage. « Non, vas-y, c’est qui ? » Bon, je crois qu’elle ne m’a pas entendue puisqu’elle ne m’a pas répondu, tant pis, je verrais bien tout à l’heure. J’essaye d’enfiler une jupe mais elle est trop petite je crois, je me tortille dans tous les sens avant d’abandonner, elle est trop petite. Je l’enlève et me rhabille. En sortant de la cabine, j’entends un peu de la conversation de Dana. « Tu vois, là, je suis partie faire les boutiques avec une amie ce matin. On va aller manger japonais, si ça t’intéresse tu peux nous rejoindre ! » Je n’entends évidemment pas la réponse de son amie mais vu le sourire de ma meilleure amie, j’imagine que son amie a accepter. Pendant ce temps-là, je fais un tri dans les vêtements que je prends ou pas et finalement, je décide de ne rien prendre. J’ai pas eu le coup de cœur, donc je reviendrais peut-être une prochaine fois. « Tu prends quoi ? » que je demande à mon Pumba.

Nous voilà quelques minutes plus tard, on arrive devant le restaurant et la vitrine ne donne pas vraiment envie d’y entrer, ça donne pas faim. Mais bon, je m’efforce de me souvenir des avis. Il faut pas que je juge sur la devanture. On rentre dans le restaurant et j’aperçois Jewel. Oh non… Ne me dîtes pas que c’est elle l’amie de Dana ? Manquait plus que ça. La meuf claque la bise à Dana et m’ignore royalement. Okay, déjà que je l’aime pas, elle arrange pas son cas elle. « Hum… Tu m’avais pas dit pour… » qu’elle dit en me désignant du menton dans le genre super discrète. « Au pire, si t’es pas contente tu peux te barrer j’te retiens pas. » Que les choses soient claires, je déteste cette fille.

Putain, mais qu'est-ce qu'elle fou... QU'EST-CE QU'ELLE FOU BORDEL !!! Si je lui donne une heure de rendez-vous, c'est pas pour les pigeons non plus. Du coup, je me retrouve à l'attendre, dans le salon de sa maison, en compagnie de son père. Je l'aime bien son père, y a pas trop de problèmes là-dessus, mais franchement, après avoir parlé du temps, de l'école et de Katalina, on a vite épuisé les sujets de conversation. « Bon, je crois que je vais monter la voir... ». Ouais, dix minutes que je suis installée sur le fauteuil dans son salon, sentant le regard de son père sur moi. Il me sourit gentiment et me fait signe que oui. Bon, je me précipite alors vers l'escalier et une fois monté, je déboule dans sa chambre sans aucune gêne. C'est bon, je l'ai déjà vu à poil et puis cette chambre, c'est un peu ma deuxième maison. Cette grognasse a pas terminé de se préparer. Putain. « - Kata, dépêches-toi ! ». Et encore, je suis polie. Peut-être parce que je sais que son père est dans le salon et qu'il peut m'entendre. Je doute qu'il apprécie que j'insulte sa fille chérie, même si c'est pas par méchanceté. « Calm down querida, on est pressées ? ». Et là, elle peut remercier le ciel qu'elle soit ma meilleure amie et que je l'aime de tout mon cœur, sinon, je lui aurais foutu une baffe. « Baloo, si un jour t’es à l’heure, je te jure que je joue au loto, j’vais être hyper supra riche. ». Haha, c'est pas faux. Mais bon, de toute façon, je vois pas pourquoi je jouerai au loto vu que je suis déjà riche... Enfin si, ça pourrait être cool de jouer au loto, comme ça, l'argent ramassé serait le MIEN et je pourrai dire byebye à mon père, sa blondasse de copine qui sert à rien et à ma sainte-ni-touche de sœur. Ouais, niveau famille, je suis pas gâtée. Enfin, mon père est plutôt sympa, mais il me soule à dire amen à tout ce que Luna demande. Tout ça parce qu'elle a « vécu des trucs pas faciles », mais de toute façon, il l'a toujours privilégié alors on me l'a fait pas à moi. Bref, on est pas là pour parler de l'autre.

Baloo et moi, on embarque dans ma superbe porsh carrera décapotable rouge – ouais, j'aime pas faire dans la discrétion – et on démarre. Un des aspects cool de l'Amérique, c'est qu'on peut conduire à seize ans, alors qu'en Italie, c'est dix-huit. Franchement, rien que pour ça, je bénie les États-Unis. Bref, on met la musique à fond et voilà qu'on chante comme des merdes, à tue tête. J'aime ça. C'est cool, avec Kata, on ne cherche pas à se donner un genre, on est nous même quand on est ensemble. Je sais qui elle est, elle sait qui je suis. Point. Y a pas à cherche plus loin. Enfin bon, je me gare dans un parking souterrain et C'EST PARTI POUR FAIRE LES BOUTIQUES !!!! On passe dans pleins de magasins essayant toutes sortes de tenues plus cool les unes que les autres. Je propose même à mon Baloo de lui payer une jolie robe qui lui va à merveille, mais elle refuse. Je sais qu'elle est loin d'être riche et franchement, moi, je ne sais que faire de mon argent, alors autant en faire profiter ma meilleure amie ! Mais elle est trop fière pour ça. Du coup, j'achète des chaussures qu'elle lorgne du coin de l’œil, avant qu'on sorte de la boutique. «  TADAAAM cadeau !!! ». Elle ne s'y attendait pas et avant qu'elle ne réplique, j'ouvre la bouche. « Et proteste pas ! C'est soit tu les gardes, soit elles finissent à la poubelle, on ne fait pas la même pointure ! Et franchement, ça me ferait mal au cœur de mettre ces merveilles à la poubelle... ». Je lui fais un air de chien battu et elle craque. Mouahaha J'AI GAGNE !!!! On continue nos petites emplettes lorsqu'une idée de génie me traverse l'esprit : ET SI J'INVITAIS JEWELL A VENIR MANGER AVEC NOUS !!!! Putain, je suis trop intelligente comme meuf, je m'impressionne moi-même ! Bon, je sais que mon Baloo n'aime pas la belle Jewel, mais ça serait peut-être l'occasion ou jamais pour qu'elles se découvrent et deviennent copines ! Je demande alors à mon Baloo si ça la dérange que quelqu'un vienne squatter avec nous au restau et elle me dit non. Voilà qui est fait.

Vers midi, j'ai vraiment, mais alors VRAIMENT la dalle. Il est temps qu'on aille au restaurant. On passe déposer nos sacs de shopping dans la voiture avant de se rendre, à pied, au restaurant japonnais. J'ai faim putain J'AI FAIIIIIM !!! Mais de toute façon, j'ai toujours faim. Je sais que la plupart des gens croient que je suis le genre de fille à faire ultra gaffe à ce qu'elle bouffe, mais c'est pas DU TOUT le cas. Je suis une goinfre. Dans la vie, j'aime deux choses : l'argent et la bouffe. Voilà. On entre dans le restaurant, j'en ai l'eau à la bouche et alors que mon Baloo se doute de rien, Jewel fait son apparition. Elle me claque une bise sur chaque joue avant d'ouvrir la bouche. « um… Tu m’avais pas dit pour… ». Je hausse alors les épaules, un peu prise au piège, il faut bien l'avouer.  « Au pire, si t’es pas contente tu peux te barrer j’te retiens pas. ». Je me mets alors à lever les yeux au ciel, avant de rire un peu. Ces deux là, je vous jure. « - On se calme les filles ! Sérieusement, vous devriez vous entendre... c'est vrai quoi, vous avez une chose énorme en commun : l'amour incroyable que vous me portez ! ». Je lève un peu les mains, le visage peint d'une expression amusée. Espérons que ça détende l'atmosphère. Un serveur arrive et je lui donne mon nom, puisque j'avais réservé à l'avance. Il nous guide jusqu'à notre table et on s'installe.

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